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Ce haut-monde

Figures in a Landscape, Francis Bacon, 1956
© 2019 The Estate of Francis Bacon
Mourir n’est pas la fin
Vivre n’y mène pas
Vivre est immobile
Nos corps sont figés là
Dans la révolution
Seule la pensée
À allure retenue
Va et vient
De long en large
De bas en haut
D’une nature à l’autre
Elle ne presse le pas
Qu’à l’abord des champs secs
– Ici la mort se trouve –
Dans lesquels l’idée germe
Que la Terre n’est rien
Que rien ne s’accomplit
Sur ce qui a été
Partialement nommé
Ici-bas

Composition de la nuit

I
Invisible silhouette lunaire
Qui marche à côté
De son corps guetté
Par le chien et le loup

II
Involontaire trajet vers
Le jour domestique
................ L’atteindre
Est-ce vraiment le but
N’est-ce pas plutôt la fin

III
Cheminer sans raison
Repousse la folie

IV
Au crépuscule le marcheur
Nomme ses morsures
Baisers
Ses cicatrices
Lèvres

Composition de la lumière

 I
Lors d’une heure comparable
À une heure évoquée
L’obscurité enferme
L’être dans son propre corps

II
Sur cette route pâle
Où le rêveur piétine
Le levant s’accroche
Aux semelles astrales
Pour ne pas incendier
Le jour de son seul feu
Et priver la prairie
Du cosmos tout entier

À la manière de Maurits Cornelis Escher

Montecelio, M.C. Escher, mars 1924, encre de Chine sur papier – ©
Il y avait dans cette heure
Solitaire
– Pièce où le temps passait
Au rythme de mes battements
Vite tellement vite
Et soudain lentement –
Une croisée donnant sur l’espace
Qu’il m’était impossible
Ne serait-ce qu’entrebâiller
Sans ouvrir ma poitrine
Et laisser fuir le temps

Sable et plume

L’aube prudemment s’avançait
Et t’habillait de sable
Doux
Sur ta peau en grève
Deux brèches de ciel
S’attardaient jusqu’au soir
L’attendant
Tu contemplais les oiseaux
Morts et vifs
Qui peuplaient cette voûte
Célébrais les uns
Te rêvais dans les autres
Quand le crépuscule s’avançait
Pour t’habiller de terre
Dure
Tu t’étais envolée

Mariage d’irraison

J’épouse lentement la forme de ce jour
Sans y avoir consenti

Jour que je nomme ainsi
Bien qu’étant vide d’heure
Et d’esprit de saison
Pâle  obscurci
Par la ramure tordue
D’un chêne possédé

Nuit contrefaisant le jour
Qui me tord les mains
Et fouille dans mon cœur
Comme dans un vieux sac
À la recherche d'un reste de sourire

Lunch Poem *8

La peau sur les os 
Mon frère
La peau et les os
Et les dieux dans le ciel
Qui s’échangent leurs anges
À l’heure où je te parle 
C’est à peine si je marche
Et voler
Je laisse ça à d’autres dorénavant
Toi tu as volé plus que je ne l'ai fait
Plus de richesses te reviennent
Car tes yeux voient encore
Quant à moi
Je me satisfais des marbrures rosâtres
D’un parquet de chambre commune
Aussi beau que je sois 
Je n’en mourrai pas moins
Aussi belle ? Qui le sait
À part toi mon frère
Devant les anges en plâtre 
Des boutiques minables
Je regrette d’avoir ri 
Car c’est là la matière
Dont je suis fait
Il me reste à vivre ainsi
Blafard
À la merci de tous
Allez mon frère
Oublions notre humanité
Il faut que je m'allège
Le vent passe bientôt
Je ne veux pas le manquer

Lunch Poem *10

Ne rien faire, penser comme en hiver. 
Dans le parc regarder le manège clos tourner.
Ne rien faire. Ne pas s’en faire.
Se souvenir de quelque chose.
Un objet.
Le tenir dans la main.
Le serrer.
Une pierre.
Ramassée dans l’allée.
Une pierre tenue toute une journée.
Le manège tourne.
S’attarder.
Des enfants sur des chevaux vivants.
Ce qui compte c’est ce qu’ils pensent.
Des chevaux vivants,
Une prairie,
Une ville bâtie près de mines aurifères.
Antiques sépultures indiennes.
Des enfants portant l’étoile du shérif
En place de leur blason scolaire.
Ne rien faire, poursuivre.
Retourner dans le tunnel.
Dépasser l’assassin.
Une jambe repliée contre la paroi,
Il tient un livre de prière.
La part de Dieu, dit-il quand je le croise.
Il le répète après que je me suis éloignée
La part des hommes, dit-il quand je rebrousse chemin.
Ne pas s’en faire. Penser comme en hiver.
La lumière fait un arc de cercle
À la sortie de la galerie.
Le manège.
La pierre dans ma main.
Les enfants délaissent leur monture.
Se débarrassent de la poussière de la prairie.
Voler leurs regards.
Traverser,
Contempler leur monde parfait.
Ne pas s’en faire.
Penser comme en hiver.
Fermer les yeux.
Dans le tunnel un bruit de pages déchirées.
L’assassin assassine.
Une pierre.
Tenue toute une journée dans le creux de la main.
Le bord tranchant serré.
Par erreur.
Serrer le bord tranchant des prières par erreur.

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