Arrêtons de nous battre Soyons douces et dociles Pour nos corps déportés Prônons plutôt l'adieu Et non pas le retour Arrêtons de vouloir Arrêtons de penser Cousons des genouillères Aux jambes de nos filles De nos jeunes garçons Et à nos propres jambes Arrêtons d'espérer Rampons comme la larve Qui commet notre viol Rampons sur cette terre Où l'arbre seul est droit Arrêtons de nous battre Soyons douces et dociles Ne pleurons pas nos corps Disparus vivants Continuons d'être mortes Continuons de sourire De peindre nos frayeurs Avec des couleurs vives Cachons notre sang Nos rides Notre graisse Laissons à portée Nos seins Et notre fente Arrêtons d'espérer Qu'un jour nous serons Aimons ce qu'on nous sert Et ne rechignons pas Ah mais vidons la table De nos restes écœurants Chaussons les aiguilles Qui freinent notre course Et empêchent la fuite N'ayons jamais de mains Mais toujours des menottes Arrêtons de nous battre Soyons douces et dociles Enfantons de la chair À pénis de larves Sans songer nous en plaindre À l'homme qui n'est pas larve Car il la craint aussi Peut-être plus que nous Veillons à ne pas prendre le nom du père Et du fils Et de la sainte mère Comme nom de putain Gardons-nous d'être aimées Par un homme ou une femme D'un véritable amour Soyons comme on nous fait Soyons comme on nous veut Perpétuons l'affreux sort De nos sœurs qui ont souffert Sans avoir vécu