d'où viennent-elles
elles font dans l'ombre
des percées ciselées
comme la lumière
entre feuilles des arbres
Il n'y a pas d'arbres autour
oui des souvenirs d'arbres
elles en parlent entre elles
durant leurs déplacements
elles disent se souvenir
des veines et des artères
avoir trébuché parfois sur l'une d'elles
elles disent rien n'est sombre pourtant
sous la terre
à cause de la course elles tombent
ça arrive
celles restées debout tendent la main à celles-là
qui gardent la main pour elles seules
jusqu'à la prochaine chute
de l'une ou de l'autre
au jour
à la nuit
elles disent
toujours ça arrive
toujours une main
elles ne rient pas de ça
mais elles rient
sinon comment ça tourne
elles disent
Chant XX

infernal grincement de la machinerie poulies essieux et chaînes qui verticalisent le signe de l’Infini pour en faire symbole de l’Interminable après le dépose tout redressé dans la paume fraîchement lavée du dieu des guerriers telle une oiselle que l’on veut entendre chanter que l’on aime entendre chanter une fois l’an tant il est miraculeux le constat que c’est encore possible sans ciel sans ailes sans lendemains qui chantent d’extraire le jus de son espérance avec une poigne martiale oui mais qui serre à peine et quand le dieu des guerriers remet l’oiselle dans sa jolie cage argentée Ailleurs c’est pire il dit Oh oui bien pire ©Toile #Sans titre, huile sur toile, Corinne Freygefond, 2019 https://freygefondcorinne.home.blog/
Chant XIV
Une histoire de traces. Comme dans une forêt blanche. L’immaculé du temps et tout le bleu de l’ombre au beau milieu du jour.* tu es partie à chacun de tes pas réflectifs la matière-miroir de ta peau a imprimé en toi part de toute chose gestes animalesques de tout être course nage vol mouvements disant mieux que paroles ça tu l’aurais juré l’involontaire suicide closant tes amours saccagées tu es restée la matière-miroir de ta peau a masqué ton visage avec figures anciennes et figures de passage aimantes ou non tu n’as pas su le dire tu n’as pas su aller le temps ? il t’a aimée il t’a aimée et puis tu l’as déçu *Caroline Dufour
Chant XVIII. Traductions italienne, anglaise & espagnole par le poète Marcello Comitini

Canto XVIII
poggiare teneramente il capo contro la spalla utopica
dell’ultima amica
rendere il suo viso come i volti
che ti hanno fatto bene
le sue labbra come le labbra che ti hanno veramente baciato
che hanno lasciato passare le parole necessariamente dure
i suoi occhi come gli occhi che ti hanno veramente guardato
che non hanno avuto paura di te
che hanno osato voltarti le spalle bruscamente
o soffermarti su vite diverse dalla tua
…
poggiare teneramente la testa contro il petto utopico
dell’ultima amica
modellare i suoi seni con il peso delle foglie di antichi alberi bronchiali
ascoltare senza angoscia il suo respiro caduco
poggiare teneramente il capo sul cuore utopico
dell’ultima amica
ascoltarlo che batte al ritmo delle sue parole
bambina nuotavo il più lontano possibile dalla riva
e dal largo osservavo
le donne della duna invecchiare
invecchiare e diventare sabbia
(Il solo…
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Chant XVIII
poser ta tête tendrement contre l’utopique épaule de la dernière amie fabriquer son visage comme les visages qui t’ont fait du bien ses lèvres comme les lèvres qui t’ont embrassée véritablement qui ont laissé passer les mots durs nécessaires ses yeux comme les yeux qui t’ont regardée véritablement qui n’ont pas eu peur de toi qui osaient se détourner brusquement ou s’attarder sur d’autres vies que la tienne … poser ta tête tendrement contre l’utopique poitrine de la dernière amie modeler ses seins avec le poids des feuilles d’anciens arbres bronchiques écouter sans angoisse sa respiration caduque poser ta tête tendrement contre l’utopique cœur de la dernière amie entendre celui-là battre au rythme de ses paroles gamine je nageais aussi loin que possible de la côte et du large j’observais les femmes de la dune vieillir vieillir et devenir sable (Il s’agit de vaincre l’éternité* pour enfin se reposer) *Phrase empruntée au texte Demeure (2) du poète Yan Kouton
Chant XVII
telle une seule dormant seule tenant racine d’arbre dans une main terre noire dans l’autre trouvant dans le sommeil compagnie des absentes chaque fois éveillée par souffle de novembre celui-là seul qui soulève ses paupières telle une seule demeurant seule levant les yeux au ciel pour y déposer nuages et oiseaux comme elle le fait toujours baissant les yeux au sol pour y déposer consoudes et nigelles de Damas et cosmos et berces du Caucase portant loin ses yeux devant elle pour y déposer sangs sauvages ares et ares et horizon telle une seule composant seule paysage pour les absentes compagnes de sommeil
Chant XVI

ouvre-toi le ventre amour ventre lourd qui te monte à la gorge égorge cette digue empilement de ruines des villes invisitées où se cognent tes vagues a-mères étripe-toi égorge-toi étrangle-toi la tempête ravageuse amour gavera les artères de ta ville d’échouement d’écume bouillonnante foisonnant de créatures mortes ou suffocantes avec lesquelles amour tu te sustenteras sans apaiser ta faim car faim tu ne ressentiras pas mais tu suffoqueras des suffocations de ta nourriture écume bouillonnante foisonnant de coquilles coupantes sur lesquelles amour tu marcheras pieds nus sans savoir que tu marches à cause de douleurs endormies par cette douleur-ci sur le sol tu rejoindras les créatures marines amour tu nageras sur le flanc sur le dur dans la traîne de leurs convulsions crève-toi les yeux amour arrache-toi la pomme d’apostrophe arrache-toi le cœur essore-le de son sang arrache-toi les seins amour avec tes cheveux filés couds ta vulve couds ta verge couds ta langue attache serrés les doigts de tes mains les uns contre les autres étouffe-toi avec le reste de ta chevelure suffoque amour encore encore et prie la tête dans la boue saline la bouche emplie de boue saline la bouche emplie de pas anciens qui te descendent dans la gorge suivant un rythme martial un deux un deux one two one two eins zwei eins zwei prie déesse tempétueuse amour prie pour son inclémence fais-lui offrande de ton corps rompu de tes organes fibreux amour attendris autrefois par ta main enfantine empoignée à grands coups de cette pierre granitique ramassée sur sillon comme sillon de Talbert à une syllabe près amour attendris à grands coups de pierre à grands coups de pierre ©Encre sur papier de Corinne Freygefond. Sans titre #19, 2021.
Chant XV

Elle Dit sur cette ancienne Terre-Mère devenue bas-monde colonisateurs vertuels de l’in-formation (qui est refus de former) auteurs de risibles bonds dans l’espace hadès et cerbères autoproclamés des enfers de surface ceux-là sous lampes scialytiques de leurs bunkers branchent des cordons sans matrices aux nombrils hypertrophiés des autres nous tous les in-formés identifiables aux os soudés de notre nuque formant courbure de soumission nous durant le court temps de notre unique vie abrégeons notre espace condensons notre langage esthétisons notre figure avec instrument de la mort que nous conservons dans la paume de notre main dont il ne reste que le pouce que nous conservons de nuit comme de jour car l’Objet est toute notre vie Elle Poétesse à grande gueule cynocéphale Dit sur cette ancienne Terre-Mère devenue bas-monde faire poésie poétique M’est amèrement impossible ©Encre sur papier de Corinne Freygefond. Sans titre #18, 2021.
Chant XIV
elles courent en déroulant dans le temps et l’espace le fil de vingt-neuf années d’une vie finie elles disent tuée tuée tuée elles courent sans cesser de le dire sans souffrir de la pente sans essoufflements elles ne peuvent pas s’arrêter de courir et de dire elles le disent aux croisés qui les désignent comme folles tuée tuée tuée tuée hier tuée dans le jeune temps de sa vie tuée bien avant sa venue tuée trois fois tuée elles ne peuvent que dire ça elles ne font pas son éloge elles ne pleurent pas elles ne se lamentent pas … on chuchote derrière leurs dos tuée par sa propre main non elles disent non non et non d’autres mains l’ont tuée des mains polyphobiques qui ne savent pas écrire ha ! qui ne le sauront jamais des mains juste bonnes à frapper des mains avec des langues pendues dans leurs paumes des mains brandissant des armes chimimétaldermiques de destruction massive tuée tuée tuée elles déroulent son fil depuis le lieu de sa mort jusqu’au lieu de la Forge où tout assassinat de l’une d’elles renforce l’acier de la Pensée et des Corps de toutes À la mémoire de Tal Piterbraut-Merx Auteure d’Outrages aux Éditions Blast https://www.editionsblast.fr/outrages et de La funambule, sous le nom de plume Cléo Dune, aux Éditions Maurice Nadeau https://www.maurice-nadeau.net/parutions/238/la-funambule
Chant XVIII

la première regarda ses mains ses mains se détachèrent d'elle tant pis elle regarda d'elle tout ce que sa souplesse et ses yeux lui donnaient à voir chaque partie de son corps qu'elle regardait se détachait d'elle et se dispersant aux cardinaux allait servir à d'autres oui allait servir à d'autres la première entendait les débris de son être chuter oui ils chutaient longuement dans un conduit de paroles barbares avant d'être happés mais elle ne cessa pas de se regarder jusqu'à ce que sa souplesse et ses yeux n'aient plus rien à lui donner à voir aussi elle regarda sa tête dans un reflet quelconque mais sa tête ne se détacha pas d'elle ©Encre sur papier de Corinne Freygefond. Sans titre #17, 2020.