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Sherman Alexie. Le psaume de la faim, 1973

Quand il n’y eut plus d’argent indien
Et qu’il n’y eut plus rien à manger
Notre père et notre mère allèrent en ville
Mettre au clou leurs alliances.

Louée, louée
Louée soit la main gauche.

Sherman Alexie « Red Blues » Collection Terres d’Amérique,
éditions Albin Michel

Laura Kasischke. Conseils de Marraine

Ma chérie, le monde
et tout ce qu’il contient
et l’arrière qui bascule en avant
dans les moments cruciaux et le fruit bleu
qui nous consume : Tout

n’est par ailleurs qu’un néant à venir
où les branches noircissent les arbres
comme en hiver et l’hiver d’un coup le printemps :
Les hommes seront en colère, et
les calculs biliaires

mais ne pleure pas : Cherche
les présages dans le ronron monotone –
tout ce qui arrive quand nous
sommes proches de nous détendre, et que les pourceaux
ronflent porcinement dans leur seau :

Essaye de rester en vie jusqu’à ta mort.
Une nuit tu te retrouveras
à chanter dans ta voiture
dans une rue loin de chez toi
radio allumée, les yeux fatigués :

Soudain la rue est une rivière de glace
et tu fais des tonneaux sur les deux voies et apprends
les lois physiques suivantes :
Les arbres ont une bonne raison de tous
pousser dans le sens du vent, et une bille de billard roulera

exactement à la même vitesse que la bille
la heurtant par l’arrière : Le choc
et la rotation des billes dans le noir
et un camion qui tourbillonne vers toi
et le pare-brise qui t’embrassera

et le rire, et les applaudissements. Souviens-toi :
Le monde est vulgaire comme tout ce qu’il contient :
Le sucre du melon
et la vie comme un fumet de tourte à la viande.
Tu en réclameras

toujours plus : La pendule
tonnera dans la salle d’attente
pendant que le porteur de cercueil titube dans ses chaussures
et que tu sortiras hébétée
et mort-née dans la rue.

« Mariées rebelles » Editions Page à Page

Jean Genet. Recueil La Parade

I

TRANSPARENT voyageur des vitres du hallier
Par la route du sang revenu dans ma bouche
Les doigts chargés de lune et le pas éveillé
J’entends battre le soir endormi sur ma couche.

II

VOTRE ÂME est de retour des confins de moi-même
Prisonnière d’un ciel aux paresseux chemins
Ou dormait simplement dans le creux d’un poème
Une nuit de voleur sous le ciel de ma main.

Le condamné à mort et autres poèmes suivi du Le funambule NRF Poésie/Gallimard

Hannah Arendt. Consolation

Viennent les heures,
Là de vieilles blessures,
Depuis longtemps oubliées,
Menacent de déchirures.

Viennent les jours,
Là aucun risque
De la vie, des souffrances
Ne peut se décider.

Les heures s’enfuient,
Les jours passent,
Il en reste un fruit :
L’existence seule.



« Heureux celui qui n’a pas de patrie » Poèmes de pensée
Editions Payot

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